Un amour qui réchauffe le cœur
Scènes de la vie rurale
Ceci est un produit de l’imagination..
Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé n’est que pure coïncidence.
Un amour qui réchauffe le cœur
Le temps ne suffisait pas pour permettre à deux êtres attirés par des sentiments réciproques de découvrir un cœur atteint déjà par la flèche de Cupidon. Comment un être qui éprouvait des nouvelles émotions pouvait demeurer insensible devant de tel phénomène qui manifestait en elle. Ne voulait-elle pas vivre sa vie comme un être normal? Son cadre de vie, jusqu'alors l'avait fait imaginer un monde différent de ce qu'elle comprenait par les flots d'images qu'André injectait dans sa mémoire.
Avec un esprit embelli par les paroles soigneusement prononcées, des histoires intelligemment racontées, Yvette jetait un regard différent envers la vie qui avait apparu si monotone, si triste. Elle avait d'abord commencé à aimer à l'écouter parler. Sa voix retentissait à ses oreilles comme une musique agréable à entendre. Quand il se trouvait auprès d'elle pour la raconter des choses de la vie, elle se sentait envahi par un profond sentiment de réconfort, d'assurance. Son cœur était tellement comblé de joie que jamais avant elle avait ressentie pareille émotion. Elle n'avait aucune raison de confondre rêves et réalités. Elle avait bien un cœur qui se réchauffait par l'amour ressenti dans une telle dimension qu'elle n'en cherchait pas davantage pour aimer la vie. Fini le temps de la solitude et de l'obscurité, cause des troubles et des obsessions qui condamnaient les gens aux esprits démunis et pauvres à une vie recluse au fin fond des bois. La clarté du jour, le lumineux couché du soleil firent apparaître sur les visages épanouis et tant admirés de ces deux jeunes tourtereaux les moindres tressaillements. Engagés dans des conversations intéressantes et animées, les commisérations des lèvres, les froncements des sourcils, l'apparition des rides au dessous des yeux, les sillons formés sur le front, les tremblements de chaque brin de cheveux, les battements des paupières étaient des particularités qui n'échappaient pas à l'attention de l'autre. Le soir, au moment où les gens ordinairement se plongeaient dans de profond sommeil, Yvette, dans sa chambre obscure, revoyait les séquences de la journée défiler devant elle. Le visage d'André prenait des formes multiples, sa voix résonnait agréablement dans sa mémoire et ses gestes étaient remplis de grâce. Ainsi cette petite fille de campagne, au visage charmant et d'une beauté sauvage, qui était cachée encore derrière le masque de l'innocence quand elle n'avait pas pris la peine encore de se métamorphoser en femme, commençait pourtant de se regarder dans le miroir pour examiner les moindres replis de son corps dénudé quand elle se déshabillait le matin pour changer de vêtements. Ce regard machinal qui auparavant pouvait être considéré comme pudique ne l'était plus au moment que l'imagination examinait les parties sensuelles et touchait à la volupté. Tout le corps se désagrégeait en un champ de plaisirs charnels. La pensée autrefois innocente se décomposait pour transformer l'enfant en femme.
Elle ne regardait plus l'homme aimé de la même façon. Elle éprouvait des sensations étranges et incompréhensibles, avait envie de tendresses clairement exprimées par les regards, des câlins suivis de chuchotements des mots pleins de réconfort et d'assurance. Tout le plaisir de l'amour est là pour la femme qui au début n'en cherche pas plus. Lui n'avait autre but que de la bercer de cette illusion aussi longtemps qu'elle pourrait encore croire à l'amour éternel, à rêver de ce prince charmant qui descend de son cheval blanc pour venir retrouver sa bien-aimée et l'emmener avec lui pour vivre des multiples aventures palpitantes.
Cette histoire aurait pu ne pas avoir de suite quand un soir, à une heure avancée, la mère qui rentrait à la maison par un raccourci fut interpellée par quelques villageois qui l'informaient que sa fille, pendant son absence, rencontrait un jeune homme dont ils ignoraient l'origine. Une telle nouvelle était suffisante pour mettre la mère hors d'elle-même. Elle avait eu tellement d'ennuis, se faisait du souci pour son fils, pour sa fille Julie pendant des jours qu'elle ne voulait plus entendre parler une fois de plus de commérages dans lesquels un de ses enfants était impliqué. Elle rentrait à la maison en interpellant Yvette pour la demander sans faire de détour ce qu'elle pouvait bien faire en compagnie d'un garçon du village. N'avait-elle pas eu assez d'ennuis pour cette fois-ci devoir chercher des explications pour une question de mauvais comportement. Yvette devait déjà comprendre qu'elle n'était pas libre d'agir à sa guise et encore moins de se montrer dans la compagnie des hommes. Elle n'était plus un enfant et avait toute raison de se tenir correctement, d'éviter d'attirer sur elle l'attention des autres, de leur donner des mauvaises impressions. C'était vrai qu'elle ne faisait rien de mal mais est-ce que les gens eux pouvaient comprendre cela. Ce n'était pas nécessaire de faire la mine, de montrer une tête d'enterrement, de chercher à avoir raison. Quand le manque d'expérience pousse la jeunesse à commettre des bêtises, c'est aux grands d'intervenir, d'interposer pour leur ouvrir les yeux, pour leur montrer le chemin à suivre. Qu'est-ce qu'elle avait fait au Bon Dieu pour que ses enfants fussent les sources de tous ses problèmes. Elle ne parvenait plus à suivre le rythme de son existence, tombait malade les jours qui suivaient et restait clouée au lit. La fièvre s'était emparée d'elle, ne la lâchait plus. Yvette était désemparée et ne savait quoi faire.
Elle courait voir quelques personnes du voisinage et leur expliquait que sa mère était malade. Ils accouraient pour porter aide à la mère, préparaient des tisanes pour faire tomber la fièvre, demeuraient à son chevet pour la soigner durant la nuit.
Yvette s'enfermait dans la chambre à côté pour se mettre à genoux pour prier pendant que sa mère délirait, luttait contre la mort. La fille brûlait des cierges, fit des promesses pour que sa mère retrouvât la santé. André avait couru jusqu'à la ville en dévalant les pentes, traversant les rivières, contournant l'étang, prenant des raccourcies pour prévenir le médecin qui se présentait tard dans la soirée pour prescrire des médicaments qui permettaient à Mme Deschamps de se rétablir rapidement. Elle avait à peine la force de parler quand elle demandait des nouvelles de son fils Fabien, cherchait Julie et prenait la main d'Yvette qu'elle ne lâchait pas. Ses enfants étaient sa seule raison de vivre. Si elle se débattait contre cette maladie qui avait eu une telle emprise sur elle, c'était pour se retrouver auprès de ses enfants qui avaient encore besoin d'elle.
Yvette avait fait preuve de beaucoup de retenu dans ces moments difficiles. Elle avait fait comprendre à André qu'elle ne pouvait plus désormais le voir ni lui adresser la parole pour ne pas déplaire à sa mère. Il avait tout compris et s'était résigné à ne rien entreprendre qui pouvait nuire à l'existence d'Yvette. Personne ne s'était déclaré encore et le moment était mal choisi pour une telle démarche.
Mais les preuves et les marques d'amitié d'André pour la famille Deschamps avaient éveillé la curiosité des villageois. Sa mère qui était allée rendre visite à Mme Deschamps quand cette dernière était gravement malade avait remarqué Yvette qui était assise dans un coin avec des chapelets. Elle avait un visage qui exprimait une tendresse infinie, des yeux larmoyants mais remplis de bonté et de sagesse.
Elle n'avait pas pu s'empêcher de l'admirer. Elle avait tout de suite compris que son fils avait des intérêts personnels pour se dévouer ainsi à cette famille. Pour démontrer davantage ses bonnes intentions André décida un matin de se rendre dans les bois pour retrouver Fabien afin de lui prévenir que sa mère était bien malade et de tenter de le ramener à la maison si c'était possible.
© Kader Rawat
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