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L'INSTIGATEUR

14 Septembre 2019 , Rédigé par Kader Rawat

L’INSTIGATEUR

Chapitre 1

Au sommet de la colline des gigantesques troncs d’arbres, perdus parfois dans des épaisses broussailles, se dressaient droits vers le ciel; le temps semblait plus paisible, plus calme, plus rassurant, peut-être parce qu’à cette époque de la saison, l’atmosphère donne une semblable apparence, peut-être aussi par l’absence totale du vent — ce qui arrive bien souvent entre le départ de l’été et l’annonce de l’hiver — ou peut-être bien que c’était dû à un mauvais présage! Qu’importe les raisons qui pouvaient expliquer cette étrange impression que ce silence absolu de la nature nous laissait dans notre esprit ! Pour sur, les réponses n’apporteraient aucun changement à ce que le temps ait pu forger au sein de l’humanité. Le temps semblait s’éterniser à jamais au milieu d’une nature sans souffle. La vie ne donnait aucun signe d’existence, à en croire que le monde était celui de la préhistoire.

Je demeurai pendant longtemps dans la grande solitude, à observer dans ma faiblesse, dans mon état déprimant, les moindres objets auxquels je pouvais accrocher mes regards. Nul ne me donnait l’envie d’en voir plus, nul ne semblait avoir à mes yeux une quelconque signification, tant je les trouvais tous plus morts que disparus quand un sentiment de frayeur, de honte, de je ne sais quel sacrilège venait me soulever le cœur. J’étais pris d’un étourdissement et je m’appuyais contre le tronc rugueux et humide d’un arbre.

Je sentais la tension de mon sang diminuer dans mes veines et je compris tout de suite que je n’avais plus de vigueurs. Mes forces commençaient déjà par m’abandonner, parce que j’avais parcouru cette longue distance, compromettant mon état de santé. Je n’avais pas songé une seule fois que la mort m’aurait traqué là où je ne l’avais jamais attendue. Et maintenant, dans cet état d’abattement où je me trouvais, quel courage avais-je à l’affronter ? Ce duel me semblait inéquitable et, à cette espèce de surdité dont je souffrais,  venait s’ajouter le problème visuel, genre de disparition d’image, de leur effacement, des brouilles qui me faisaient confondre tout dans un mélange de petits points noirs. Etait-ce le commencement de ce grand voyage dans l’au-delà ? Je ne pouvais remuer aucun de mes membres, malgré que je garde toujours mes sens, ma conscience par la seule volonté de vouloir rester éveillé, non pour assister à ma mort lente et à petit feu aux confins des bois,  mais pour mener une lutte contre cette même mort qui voulait  me prendre au revers. Je réunissais ainsi mes forces pour relever le défi qu’elle m’avait lancé.

J’ouvris mes yeux grandement et levais la tête vers le haut. Entre les interstices des branches, je pus voir le ciel bleu clair. J’implorais Dieu de me pardonner les fautes et les erreurs que j’avais commises dans mon ignorance et de me donner une chance de vivre. J’avais l'impression que je venais de subir un échec dont j’étais en train de supporter les conséquences. L’émeute sanglante que j’avais assisté la veille et à laquelle j’avais participé me paraissait loin, distant, mais l’écho me resonnait encore dans les oreilles. Je savais que si je voulais vivre, si je ne me laissais pas m’engouffrer, m’enliser dans la mort, c’était pour l’unique raison qu’une voix m’avait appelé dans les ténèbres, une voix qui me tourmenterait jusqu’à ma mort si je ne répondais pas à son appelle. C’était la voix de Roseline.

Je me laissais glisser lentement sur mes genoux en implorant Dieu de me donner du courage. Je me prosternais jusqu’à ce que mon front soit marquait des grosses graines de terre dans lesquelles je l’avais enfoui. Je demeurais pendant un laps de temps inimaginable dans cette position jusqu’à ce que la force pénètre à l’intérieur de moi d’une manière si mystérieuse que je pus sentir gonfler mes veines par le flux du sang.

Je m’étonnais devant le fait que j’éprouvais dans la solitude une singulière frayeur, me sentant coupable, résigné en présence d’une autorité indicible qui se dressait devant moi, magistralement, comme pour m’obliger à me plier sous sa volonté. J’étais pourtant bien habitué à des régions solitaires que je ne parvenais absolument pas à comprendre comment je pus être autant perturbé par la solitude qui longtemps demeurait ma compagne favorite! Combien de temps n’avais-je pas passé tout seul dans les bois, soit à me consacrer à des ferventes prières, soit à me livrer à des longues méditations, soit tout simplement à me reposer? Que marriva-t-il pour que maintenant, au lieu d’éprouver les mêmes délices qu’autrefois, au lieu de savourer le calme avec le même goût, au lieu d’apprécier la solitude et les charmes de son silence je me sentais envahi par un bourdonnement perpétuel, par une espèce de conflit qui grouillait dans ma cervelle, par des bruits qui venaient remplacer ma surdité et m’obsédaient au point à me faire perdre la mémoire. Etait-ce la présence de Dieu qui augmente cette tension en moi ? Je sentais tout se tournoyait autour de moi et j’avais l’impression que je me laissais aller à la dérive dans un monde auquel je n’étais pas habitué. Cette sensation me poursuivit pendant un bon moment jusqu’à ce que je perde la notion du temps. Le calme s’établit dans mon esprit quand je me découvris me tordre de douleur.

Un extrait de mon roman l'Instigateur

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l'instigateur (MAÎTRES ET ESCLAVES t. 4) par [Kader Rawat] ​​​​​​​

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